Voyage aux portes du ciel. J’avais déjà été impressionné par les quartiers de maisons de bois de Panamaribo la capitale du Suriname. Mais parmi près de 300 maisons et édifices locaux classés au patrimoine mondial de l’Unesco, cette cathédrale St Petrus en Paulus toute en bois, est le monument le plus éblouissant !
Je l’ai découverte en fin de journée quand la lumière douce faisait ressortir ses peintures jaune et bleu-gris sur un fond de ciel bleu azur et de nuages blanc lumineux. C’est une des rares cathédrales en bois du monde. En 2014, elle a reçu le titre de basilique du Pape François, car elle est un lieu de pèlerinage sur le tombeau d’un prêtre hollandais béatifié qui soignait les lépreux au XIXème siècle. J’ai remarqué que la grande synagogue de Panamaribo aussi était en bois. Ailleurs dans le monde j’avais vu une splendide cathédrale en bois dans l’île de Kidji en Russie et je sais qu’il existe de grandes églises en bois dans l’île de Chiloé au Chili.
Mais pour construire un tel édifice de plus de 50 mètres, entièrement en bois, sur le modèle d’un édifice en pierre, en style « néo », moitié roman (pour les arcs à plein cintre de la nef), moitié gothique (pour les deux clochers), il fallait oser ! Quand elle fut construite en 1883-1885, les colons n’avaient pas vraiment le choix. Les quelques briques utilisées comme assise des maisons de bois de la ville étaient celles qui servaient de lest aux navires arrivant d’Amsterdam -puisque ce pays était alors la Guyane hollandaise- et il n’y avait pas de fabrique de briques… or, la forêt gigantesque tendait ses bras à côté offrant les meilleurs bois.
Pour soutenir un tel volume et un tel poids, les architectes ont choisi pour les piliers un bois local aux propriétés incroyables, le greenhart (chlorocardium rodiei), un des bois les plus durables et résistants au monde. Ce bois extrêmement dense et dur qui résiste sans traitement à l’eau des marécages et aux attaques des insectes est bien connu des architectes navals. Le reste de l’édifice est composé de différentes sortes de cèdres aux teintes variables, du jaune au brun en passant par le rougeoyant, dont les planches émettent de curieuses senteurs épicées.
Lors de la construction, raconte-t-on, l’esclavage venait d’être aboli et les menuisiers créoles affranchis auraient exprimé toute leur créativité dans les sculptures des chapiteaux. Ce sont leurs descendants que j’ai croisés en visitant cette église. Ils parlaient et priaient dans le créole de ce pays multiculturel, le taki-taki, mélange de plusieurs langues européennes (au premier rang desquelles le hollandais), africaines (par les esclaves), asiatiques (par les immigrants) et locales (par les amérindiens).
Cette cathédrale Saint Pierre et Saint Paul a bien failli disparaître après l’indépendance, en s’effondrant, rongée par les termites. Fermée pendant 20 ans, elle a finalement été admirablement restaurée et rouverte en 2010. Elle vaut le voyage.
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