« Globe-chanteur ». C’est le surnom qui lui a parfois été donné. On l’a aussi qualifié de « chanteur-voyageur ». « Ma musique a toujours été influencée par le monde », estimait-il dans une interview au Monde en précisant encore : « j’ai la chance d’avoir un passeport en règle de pouvoir voyager partout. J’aime ça, c’est comme une drogue. Mon université ce sont les voyages. Je me sens comme à la maison n’importe où. » Il ajoutait encore : « une chanson peut naitre comme ça dans une salle d’embarquement ou dans un taxi, il n’y a pas de règle ».
Moi que mon métier de journaliste oblige à écrire à peu près n’importe où et en toutes circonstances, j’aime bien cette philosophie de l’itinérance qui transparait dans ses musiques. Elles puisent leurs inspirations un peu partout : rock, reggae, latino, rumbas, Caraïbes, jazz et même afro puisqu’il a produit les chanteurs maliens Amadou et Mariam. A tel point que Manu est difficilement classable et échappe aux catégorisations. Je trouve ses musiques de fête, animées, sautillantes, parfois étourdissantes, sa petite voix latino énergique, tendue, parfois haletante.
Son errance se voit aussi dans certains de ses textes, par exemple quand il chante dans « El viento » (Le vent) : « l’homme vient, l’homme s’en va, sans plus de raison (…) Sur la route la chance vient, la chance s’en va, vers la frontière… ». Ou encore dans un de ses énormes succès que fut « Clandestino » en 1998 quand il dit « courir c’est mon destin ». Il y raconte le voyage, d’une actualité toujours tragique, des émigrants clandestins : «Vers une ville du nord je suis allé travailler. J’ai abandonné ma vie entre Ceuta et Gibraltar ».
On comprend qu’il agace ou fait peur ce chanteur subversif qui s’affiche altermondialiste, engagé dans tous les combats contre les murs et les frontières, toujours en première ligne comme au Forum social mondial.
Ses succès planétaires l’ont conduit à faire d’immenses tournées autour du monde, avec ses groupes Mano Negra, Radio Bemba, La Ventura, surtout en Amérique Latine, là où il se sent le plus à l’aise. Ainsi ses voyages alimentent ses chansons qui entraînent ses succès lesquels génèrent d’autres voyages… J’attends avec impatience les nouvelles musiques et les nouvelles chansons de ce vagabond franco-hispano-latino de la chanson cueillies sur ses routes.