Cultures antiques et nouvelles. J’ai raconté hier comment le quartier art nouveau de Riga en Lettonie m’avait impressionné. Mon impression a été d’autant plus forte que les façades foisonnantes de ces immeubles que j’ai découvertes étaient peuplées d’innombrables personnages humains, principalement féminins, soit en portraits, soit en mascarons, masques ou médaillons, soit en bustes. C’étaient, dit-on, les portraits de cantatrices et actrices des scènes d’art dramatique et d’opéra de l’époque.
Il faut comprendre que l’architecte Mikhaïl Eisenstein était une personnalité multiculturelle, aux ascendances juive germano-balte et suédoise tout en étant russe de nationalité à une époque où l’on parlait encore français à la cour des tsars. Si bien qu’Eisenstein qui parlait aussi bien français qu’allemand et russe était très perméable aux influences, même lointaines, de la culture occidentale, tout en étant imprégné de culture antique.
Son ouverture culturelle se décèle par exemple à ces statues en bordures de toits de figures féminines se tenant la tête en criant. Le guide qui m’accompagnait ce jour-là m’a indiqué que c’était une référence explicite à une des peintures expressionnistes les plus célèbres de monde, du peintre norvégien Edward Munch, « le cri ». Quand on voit un faune jouant de la flûte de pan, on ne peut pas s’empêcher de penser au poète Mallarmé et au compositeur Debussy qui étaient dans l’air du temps. Que les figures sculptées soient hiératiques ou expressives, inspirées de l’antiquité ou de l’art contemporain, tout était bon pour Eisenstein pour faire sortir du relief.