Emportée par la foule. Chaque jour, dès le matin, plus d’une heure avant l’ouverture des portes, quelques dizaines de milliers de personnes sortent de la gare de Rho Fiera, le terminus de la ligne de métro M1 de Milan. Une masse compacte s’entasse derrière les portiques de sécurité. Dès que les portes s’ouvrent, cet essaim déboule vers l’allée centrale, plus large qu’une autoroute, de « Expo Milano 2015 ». 160 000 personnes entrent ainsi chaque jour dans cet espace de 1 km² de l’exposition universelle qui se tient encore jusqu’au 31 octobre prochain.
Je n’imaginais pas être emportée par une masse aussi compacte qui me pousse et me tire. Ma première impression de cette expo universelle est donc celle d’une incroyable affluence comme dans un stade de foot, une salle de spectacle, le métro aux heures de pointe ou une manifestation de rue. Je suis donc aspirée sous les velums de cette immense artère piétonne, appelée « decumanus » (« decumano » en italien) et tout le long de laquelle s’exposent de part et d’autre les pavillons de 145 pays.
Comme des fourmis industrieuses, cette foule se répartit très vite autour de cet axe aux portes des pavillons les plus prestigieux pour entrer à nouveau dans d’interminables queues, dont certaines dépassent les deux heures d’attente. J’ai l’impression que le mot « universel » convient à cette multitude en étant le reflet des milliards d’habitants de notre planète en 2015, surtout des populations urbaines, qui passent de plus en plus de temps à faire des queues dans les supermarchés, les aéroports, les administrations, ou les salles de spectacles.
Pour faire de mauvais jeux de mots, c’est un peu un rassemblement très catholique (dont la racine grecque signifie « universel ») ou une fête de l’humanité toute entière. Passées mes premières impressions d’écrasement, je comprends que mon voyage au cœur de cette marmite me confronte à un intense brassage de populations, de styles, d’arts et d’architectures, de cultures, …. Le regard peut rester superficiel, mais au détour de mes pérambulations dans ce courant d’air je suis confrontée aux grandes questions de notre humanité. Par exemple un panneau géant sur le pavillon suisse, reprenant le titre d’un film italien (ce n’è per tutti) demande « est-ce qu’il y en a pour tout le monde ? ». C’est précisément le thème de cette Expo Milano 2015 : « nourrir la planète ».