En quinze jours, nous parcourons 2 700 kms en 4X4 sur des grandes et petites routes ou sur des pistes, voire des terrains pas vraiment carrossables du sud éthiopien. Nous sommes douze, et au cours de cette grande boucle jusqu’à la frontière kenyane, la route en elle-même est une sacré expérience !
En ce mois de février, nous partons d’Addis Abeba, la capitale de l'Ethiopie, perchée à 2500 mètres d’altitude. Nous descendons progressivement en prenant la route qui part vers Awash et Djibouti. C’est une route encombrée d’embouteillages et de chantiers, polluée de poussières et de gaz d’échappement, et, toutes fenêtres ouvertes, il fait vraiment très chaud. Le bord de la route est un capharnaüm de toits de tôle, de vaches, d’églises, de mosquées, de banques, de tas de pneus usagés, de boutiques en tous genres. Heureusement les bougainvilliers en fleurs égaient le décor.
Des ânes beaucoup trop chargés
En sortant de l’agglomération, voici les premières images de campagne avec des tas de paille fraîche, des vendeurs de charbon de bois, et toujours des marcheurs à pied, des vaches, des camions et de pauvres ânes beaucoup trop chargés. Nous bifurquons à Mojo pour prendre la route du sud qui se dirige vers le Kenya. Passé cette ville nous entrons dans une zone de maraîchage. Les camions sont pleins d’ouvriers accrochés au-dessus des chargements. C’est un défilé de vendeurs de tomates, d’oignons, des charrettes de canne à sucre et de bois,... Nous faisons un arrêt pour observer une aire de battage de teff (une céréale locale) où 14 zébus sont attelés. Puis, le décor se ruralise encore plus avec les premières termitières, des tombes peintes, un habitat en huttes, et des vélos, des triporteurs et beaucoup de charrettes à ânes.
Premières pannes
Passé la ville de Shashamane, la piste n’est plus toujours en très bon état. Ca penche à droite, à gauche. « Méfiez-vous » lance l’un des hommes « si l’on penche à plus de 45° le 4x4 va se renverser » …avec un sourire en coin pour effrayer les 3 nanas qui sont blotties à l’arrière. La route reprend de l’altitude. A 3400 mètres l’un des 4x4 a du mal à monter dans les virages. Panne de pompe hydraulique ! Malgré l’altitude, il fait 32°C. La panne est réparée et on reprend la route. On voit que les bus peinent aussi. Nouvelle descente. Nous nous dirigeons vers les lacs du grand sud éthiopien. Nouvel arrêt pour une crevaison. La route est goudronnée, mais avec beaucoup de nids de poules, et jalonnée de troupeaux de vaches et de charrettes remplies de jerricans jaunes.
Autour des lacs du sud
Les lacs du sud ethiopien sont en vue. Nous surplombons le lac Shamo dans un paysage vierge de toute infrastructure. De notre vision panoramique, nous n’y voyons qu’un seul petit bateau, un aigle, une aigrette, un pélican, un crocodile. A gauche un peu plus loin nous apercevons un lac rouge de latérite, le lac Abaya.
Si on n’était pas en Ethiopie, on parlerait de montagnes russes. Car ce pays est une succession de montagnes et de hauts plateaux. Cette fois, notre nouvelle montée sur cette piste ravinée est chaotique. Par endroits, nous avons l’impression de vivre « le salaire de la peur » et il vaut mieux fermer les yeux… Après le lac Abaya, les 4X4 redescendent la montagne et il nous faut deux heures pour parcourir 32 km. C’est dire que le chemin est toujours aussi hallucinant et spectaculaire. Cette fois la descente nous conduit vers la vallée du fleuve de l’Omo, là où elle rejoint la vallée du Rift, la grande faille de l’est africain surnommée « le berceau de l’humanité ».
Crevaisons en territoire Hamer
Nous sommes maintenant en territoire Hamer, ces éleveurs semi-nomades parés de colliers de coquillages et jupes en cuir. De grands champs de coton, sont protégés par des gardes armés. L’altitude a diminué à 700 mètres, tandis que la température a sensiblement augmenté : je note 36°3C à l’ombre. Nous croisons de belles termitières, une éolienne, une machine de forage et son compresseur. Et la route remonte, jusqu’à un col. Les jours suivants nous font aller encore plus au sud en empruntant des chemins parfois périlleux marqués de plusieurs crevaisons. Ainsi les descentes de 4x4 dans les rivières asséchées sont épiques ou les pistes de « tôle ondulée ». Finalement nous apercevons le lac Stéphanie qui borde le Kenya.
Sur la route Le Cap-Le Caire
Après cette boucle jusqu’à la frontière kenyane, nous retrouvons, en repartant vers le nord, la grande route nord-sud Le Cap / Le Caire qui traverse toute l’Afrique de l’est. Ce grand ruban rectiligne est bordé de termitières rouges au milieu d’acacias. Certes cette route est belle car elle nous permet de remonter plus vite vers le nord en nous offrant quelques pointes à 100, voire 110 km/h. Mais jamais longtemps car il faut quand même ralentir pour laisser traverser les vaches, éviter les charrettes, les camions en panne, les chèvres,...
Une voie ferrée mythique mais inutile
Nous voici de retour à à Shashamane où nous prenons la direction d’Addis Abeba. Il nous reste 250km pour retrouver la capitale et déjà nous ressentons une plus grande densité et fébrilité humaine avec des centaines de charrettes chargées de bois, de bidons, de sacs de blé et, en plus, surchargées de gens au-dessus de leurs chargements.
Un moment, nous longeons la mythique voie ferrée Addis Abeba / Djibouti …qui ne fonctionne plus, faute d’entretien et pour cause d’attentat. Finalement notre retour dans Addis Abeba se fait au milieu d’embouteillages, et de de plus en plus de camions. Nous sommes à des années lumières des pistes quasi désertiques et des ethnies si proches de la nature rencontrées dans les montagnes du sud il y a quelques jours.
- Inoubliable, la vue à plus de 4000m d’altitude surplombant à perte de vue de parois de près de 1000 m de hauteur et des paysages grandioses.