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"Chroniques birmanes" de Guy Delisle

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"Chroniques birmanes" de Guy Delisle

L’expat s’épate. J’avoue que j’ai eu un peu de mal à entrer dans cette épaisse BD en noir et blanc. Je trouvais les dessins frustes et patauds, et l’autoportrait du dessinateur, faussement cubiste. Ses textes me semblaient, gentils et enfantins, émaillés de réflexions simples et primaires. L’auteur se met en scène quasiment à toutes les pages et se raconte avec un égocentrisme superficiel centré sur ses bobos et ses problèmes d’Internet. Pour tout dire, ses premières pages m’ont un peu agacé.

Puis, petit à petit, je me suis laissé gagner par son regard faussement naïf, critique et même autocritique. Guy Delisle (on devine tout juste qu’il est québécois d’origine) a atterri en Birmanie, une destination touristique encore un peu exclusive par son coût, pour suivre sa femme employée de Médecins sans frontières (MSF). Dans la même veine, il a aussi produit d’autres BD d’expatrié observateur sur Shenzhen, Pyongyang et Jérusalem. Ses traits stylisés sont souvent justes.

On sourit de son humour et de ses clins d’œil.  Il passe sans transition des questions domestiques les plus basiques et pratiques aux sujets de plus haute volée stratégique et diplomatique. Ses scènes de rues, boutiques, cafés valent souvent mieux que des photos (sans problème de droit à l’image de surcroît !). On y apprend beaucoup, avec son talent pédagogique qui n’en a pas l’air, sur la vie sociale, la politique ou le tourisme. Parfois avec de longs bavardages, parfois avec des pages sans paroles comme ses visites touristiques à Bagan ou au Lac Inlay.

Ainsi, il observe avec étonnement les coutumes des birmans qu’il rencontre, comme leurs chiques de bétel qui noircissent leurs dents et qui les font cracher un peu partout. Sa vision des birmans reste souvent plutôt négative. Il voit rarement la souffrance et le dénuement des plus pauvres. Le microcosme dont il a du mal à s’extraire est celui des expatriés dont il décrit par le menu les tracas et les angoisses, les clubs et les cocktails. Il décrit aussi les médiocres bassesses de la dictature, la tyrannie des militaires, les combines de la corruption et la peur des birmans. Heureusement, en définitive, on a quand même l’impression en fermant le livre d’avoir voyagé et appris quelque chose sur la Birmanie. 

 

Editions Delcourt, collection Shampoing

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